Abdul, Rhami et Rebwar sont Kurdes. Ils ont fui l’Iran en raison des persécutions politiques subies. Ils ont entamé leur exil par la voie terrestre et sont passés par la route des Balkans où ils ont été victimes de multiples violences. NDLR : J’ai pu constaté certaines marques de ces violences sur le corps d’Abdul qui a accepté de me les montrer.
Après quelques mois sur la route, ils sont arrivés en décembre 2020 en France. Leur but était de se rendre au Royaume-Uni. Bloqués à la frontière franco-britannique, ils survivaient dans un camp d’infortune, en présence de centaines d’autres personnes exilé.es, dans l’attente de pouvoir traverser cette frontière.
Je les ai rencontrés fin février pour la première fois. Le froid rendait la vie sur le camp extrêmement difficile et la fatigue se lisait sur leurs visages. Ils ne souhaitaient qu’une chose, pouvoir vivre enfin sereinement et épargner leurs familles de potentielles représailles.
Tous les trois ont finalement réussi à se rendre au Royaume-Uni durant le printemps après plusieurs tentatives de passage. Ils attendent toujours de pouvoir obtenir leur demande d’asile afin de travailler.
« Je suis reconnaissant qu’après quelques mois de harcèlement, je sois maintenant arrivé dans un pays où je me sens calme et avec l’intention de pouvoir changer ma vie. Après avoir passé 2 mois à l’hôtel, ils m’ont donné un foyer et je commence à m’habituer à ce pays. Je vais à l’université pour apprendre l’anglais. Mon seul malaise est l’éloignement de ma famille, je prie pour que cette attente cesse le plus rapidement. »
« Les Kurdes d’Iran sont la cible de la part de la République islamique d’une double série de discriminations, en tant que Kurdes dans un régime d’un centralisme sourcilleux, d’une part, et en tant que sunnites dans un système privilégiant systématiquement la majorité chiite, d’autre part.
La langue kurde, bannie des écoles publiques, ne peut être enseignée que dans des établissements privés, eux-mêmes soumis à l’autorisation préalable de l’Etat. Le militantisme kurde est méthodiquement réprimé, aussi bien dans les régions frontalières de l’Irak que dans le Khorassan, au nord-est du pays.
Près de la moitié des détenus politiques en Iran sont d’origine Kurde, selon le rapporteur de l’ONU pour la situation des droits de l’homme dans ce pays, alors que les Kurdes représentent moins du dixième de la population iranienne. Les Kurdes, à la fois minoritaires ethniquement et religieusement, pâtissent de graves entraves dans leur accès à l’emploi, au logement, à la propriété et aux fonctions d’encadrement politique et administrative. Les deux provinces kurdes sont reléguées, en terme de développement aux tout derniers rangs des trente provinces iraniennes, avec le Baloutchistan. (…) »
Auteur – Jean-Pierre Filiu, professeur des universités en histoire du Moyen-Orient contemporain
Source – Retrouvez l’intégralité de l’article https://www.lemonde.fr/blog/filiu/2019/11/24/les-kurdes-diran-oublies-de-tous/
NDLR : Note de la rédaction